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par CristaudeHauguernes » 24 oct. 2014, 00:10
Bonsoir à tous,
Sujet passionnant, il est vrai. Cher Thieum, je te dirai d'abord qu'en matière de cèpes et de mycorhize avec les arbres, les informations que nous trouvons dans la plupart des livres, même les plus doctes, sont très en deçà de la réalité. Car rien ne vaut le terrain, à condition de le confronter aux livres et de se forger une expérience...
De mon point de vue, aucun doute, il s'agit bien d'aereus, en répondant à l'appel de Kriss, j'ai d'abord pensé à des pinos très noirs, je me suis aussi souvenu d'une variété noire d'edulis rencontrée très haut à Iraty, sous hêtres et sapins en mélange avec mes parents il y a fort longtemps (boletus fuscoruber), mais cet edulis noir était plutôt "lie de vin". Mais bon, à la vue des photos, pas de doute. Il faudrait savoir vers quelle altitude tu as fait cette rencontre, il se peut qu'à cet endroit, aereus, pourtant thermophile, cotoie l'épicéa (plutôt cryophile) dans les bois mêlés. Or le mycélium ne choisit pas toujours (= n'a pas toujours le choix) de son arbre hôte, si des spores d'aereus choient dans une pessière pure, à la condition que l'épicéa soit compatible (ce qui semble être le cas donc), le mycélium pourra à l'occasion se lier à cet arbre, peut-être les années plus chaudes favorisent-elles d'ailleurs cette union. Nous savons qu'aereus monte au moins à 1000 mètres sur le pourtour méditerranéen, j'ai quelques signalement de l'espèce à 500 dans le 64, il se peut donc que les deux espèces se croisent en altitude.
Le mycélium est un opportuniste, c'est la vie, ou plutôt la survie qui l'exige. Ainsi que je l'ai fait observé à des amis il y a peu, j'ai des dizaines d'aestivalis chaque année le long d'un liseré de tilleuls coincés entre un ruisseau et un pré, avec même de rares aereus. C'est bien le seul endroit où les cèpes sont clairement associés aux tilleuls, et pourtant il n'y a pas de doute. J'ai aussi noté de sympathiques associations dans les plaines béarnaises entre l'aestivalis et les sapins pectinés, aboutissant localement à une production annuelle impressionnante. Or, en altitude, aestivalis est rarissime sous abies alba, ce cèpe ne dépassant guère 1300 mètres et préférant nettement le hêtre. Enfin, pas plus tard qu'hier, cheminant le long d'une petite route de campagne, quelle ne fut pas ma surprise d'apercevoir 4 cèpes dans un parc de thuyas du Canada, les premiers chênes se trouvant à près de trente mètres, de guingois, il s'agissait d'aestivalis et d'aereus. Moi qui disais pis-que-pendre de ces arbres... Tout cela pour dire, que nous en apprenons tous les ans, à chaque saison sur les cèpes, que les surprises ne manquent pas et que c'est peut-être aussi un peu de notre motivation...
Adishatz,
Cristau